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jeudi 29 septembre 2016

N’est pas Baye Fall qui veut !

Aujourd’hui, les représentations sociales à propos des Baye Fall sont diverses, voire contradictoires, et oscillent globalement autour de deux figures : d’un côté, le disciple musulman parfait, ayant le courage de « donner sa vie » à un homme saint et à Dieu, suivant sans faille et sans hésitation ses ndigël (ses recommandations, ses ordres) et respectant ses interdits ; de l’autre, le jeune en perdition, qui construit son rapport à la religion de façon individuelle et autonome. Qui sont les Baye Fall et comment comprendre cette diversification des modes d’adhésion et d’identification ?

Les Baye Fall au Sénégal, une communauté banalisée...

Selon l’image populaire, le Baye Fall est très souvent perçu à travers des déformations multiples. Il a toujours été associé à un personnage folklorique (amusant, bizarre). Toutefois sur le plan culturel, l'originalité des Baye Fall dépasse les frontières du Sénégal et fait même école ailleurs. Sa chevelure (dreadlocks), la ceinture (dér), le bonnet, le chapelet (Njàlaban), le njàxass (vêtement rapiécé ou en patchwork) symbolisent les aspects culturels de la communauté. Serigne Ndiaga confirme que Serigne Cheikh Fall Baayu Goor (fils ainé de Mame Modou Moustapha Fall, 1er Khalif des Baye Fall) lui disait que ces aspects culturels comme les dreadlocks, le njàxass et le màjjal (nourriture obtenue en mendiant) ne s’effaceront jamais de ce bas monde, car c’est le résultat des Hommes de Dieu. En réalité, le véritable Baye Fall s'oppose aux vices et mène une vie austère qui le détache de tous les interdits, tout en symbolisant le mouridisme sous ses facettes économiques, sociales et culturelles. Mais, dans la pratique, beaucoup de ceux qui se définissent comme Baye Fall le font pour leur propre business, ou bien d’échapper aux rigueurs de la religion, en ternissant la réputation de la communauté. De nos jours pour se faire de la place dans milieu du showbiz, il suffit de s’identifier à la communauté. Le concept Baye Fall est devenu un passe partout dans le monde des célébrités, banalisé sous toutes ses formes, surtout sur le plan culturel, les gens n’arrivent plus à distinguer quel est le vrai personnage, par manque de connaissance de la communauté. Loin d'être ces personnages qui porte atteinte le plus à l’image de la communauté, le Baye Fall est l'exemple du bon disciple hors pair marqué par : l’abnégation totale face aux biens de ce monde et le respect scrupuleux des recommandations du marabout.
                                 Célèbre Chanteur sénégalais en tenue Baye Fall à Bercy

Qui est Baye Fall ?

L’idéologie de la communauté Baye Fall est fondée sur le culte de travail, la foi et le respect des valeurs sociales. Le Baye Fall applique à la lettre le principe du "Jébëlu"; autrement dit la soumission, qui le lie à son marabout descendant de Cheikh Ibrahima Fall ou un autre personnage qui ne porte pas le nom de Fall, mais qui a été élevé au rang de Cheikh par Mame Cheikh Ibrahima Fall. Pour atteindre la perfection, et donc Dieu, le Baye Fall doit d’abord se « purifier » intérieurement, devenir humble et accepter les « épreuves de la vie », pour pouvoir se soumettre ensuite à un guide religieux. Mame Cheikh influence donc profondément la formation des normes dominantes mourides, au niveau de la soumission du disciple, des vertus d’un travail physique pénible au service du marabout et de la prééminence de l’éducation par rapport à l’enseignement (pendant la Tarbiya, l’apprentissage au daara). Le travail, parce qu'il permet le dépassement de soi dans l'effort, est le premier credo du Baye Fall. Aujourd'hui comme hier, les vrais Baye Fall continuent à défricher chaque année des centaines d'hectares, en abattant en une journée des superficies importantes. La production agricole du Sénégal a du reste connu des performances légendaires grâce à ces soldats de la foi au zèle inégalé.

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